lundi 19 août 2013

LA LANGUE ET LE THEATRE

Quand Maurice se met à parler, il parle. Il dit. Il m'observe avec acuité sous sa casquette. Il cherche sur mon visage jusqu'où il doit aller. Ses yeux me questionnent sans arrêt. Il a au fond de lui une certitude - celle de se donner tout entier - et il le fait en se questionnant en permanence sur ce que je vais en faire. Mais plus profond et plus solide est l'espoir que je lis dans tout son être. L'espoir que ce qui commence ici fasse avancer les choses. Pas question de dénoncer pour dénoncer - ce qui se fera pourtant - mais surtout espérer que cela aide à changer les hommes.

La langue de Kunie est unique, bien sûr, mais elle a ce quelque chose d'unique aussi dans les sonorités. Ici toutes les îles ont chacune leurs langues et toute la Nouvelle-Calédonie est partagée en aires coutumières qui respectent l'identité de ces langues et donc des tribus qui les parlent. Le Kunié chante avec la bouche, avec le nez, avec la gorge et avec la langue. Tous ne l'écrivent pas. Tous ne savent pas qu'ils peuvent l'écrire et apprendre à l'écrire. Tous se questionnent sûrement sur l'utilité de le faire.

Raconter plus tard cette histoire à ma façon sera certainement une façon de respecter cette langue que l'on n'entendra pas et ces femmes et ces hommes de ces tribus qui s'offrent au public.
Sonorités, musiques. Voix, chants. Mouvements, danses. L'histoire qui débute sera aussi proche du "Petit Nuage de Magellan", dans ce mélange de monologues et de musique, que du prochain projet basé sur le silence.

Le silence

Beauté des phrases éternelles, des mots aimés écrits pour ne pas être dits, des lettres effacées pour ne pas être lues, des regards qui murmurent immédiatement étouffés par les paupières baissées, beauté du souffle qui passe et traduit les non-dits, beauté des sons changés en brises légères et porteurs de promesses, d'aventure et d'exception. Le silence, souffle d'exception. Femme d'exception. Homme d'exception.


A toi à qui je parle, à toi à qui j'écris,

A demain.