lundi 25 août 2014

LE PÊCHEUR ET LE PEINTRE

"KRIKOWSKY: Avoir la possibilité de traduire la réalité du monde est une chance, la plus grande des chances, c'est la richesse suprême... un vrai don de la nature. Mais il n'est pas gratuit. Celui qui a été choisi a la mission de ne pas le gaspiller. Quitte à en crever... Il faut aller jusqu'au bout des choses, même si on ne sait pas où cela mène. Il faut garder le contact, c'est essentiel. Sans l'art nous sommes tous perdus. Il faut toujours chercher à se dépasser. Et il y a des jours où je suis pris d'un tel sentiment d'impuissance...

JIM: Jim écoute Krikowsky. Le peintre est déjà debout, ses paroles encore trainant dans son dos. L'eau de la vague qui monte avec la marée, réduit les couleurs à ses quelques molécules, gorgées d'air, qui flottent dans l'écume, et blanchissent tout. Jim regarde la mer. Il en extrait de l'image le souvenir métaphysique de la maternité d'où la vie est issue. La mer ne contient pas seulement du sel, de l'iode, de l'hydrogène, de l'azote, de l'or, de l'argent, du nickel, de l'aluminium, du fer, du cobalt, du titane, du molybdène, du cadmium, du gallium, du lanthane, du radium, du thallium, du germanium, de l'antimoine, du fluor, de l'arsenic, du bismuth, de l'yttrium, du sélénium, du caésium, du thorium, du scandium, du cérium, du lithium, du baryum, du ribidium... Elle est l'origine.

LE GAMIN: Oh toi mon amour mon amour mon amour ma merveilleuse, mon océan, mon origine, ma magicienne, mon île, oh toi qui m'as ouvert l'origine du monde et fait entrer dans le secret de notre fusion, je plonge, je me laisse entrainer, je me laisse couler dans les effets marins de ta féminité, toi ma mer, ma vie, que j'aime comme je n'ai jamais aimé... "